Bars & Clubs

Le Temple: Fusion

Genève, sam 6 avril, 23:00
Agenda
#Danse

Le cerveau mou de l’existence

Lausanne, mar 16 avril - dim 21 avril
Community

Atelier et After Drag

Sion, sam 30 mars, 15:00

Sheila Wolf, queen du burlesque

Sheila Wolf, queen du burlesque

À Berlin, la figure la plus emblématique de la scène burlesque est une drag queen. Et pas n’importe laquelle: Sheila Wolf, alias Wolf Teichert, est ouvertement... hétéro. Rencontre.

Il y a une quinzaine d’années, Sheila Wolf a débarqué perchée sur ses hauts talons dans le petit monde du burlesque berlinois. Et s’est rapidement hissée en haut de l’affiche: ses deux revues annuelles, la «Vaudeville Variety Burlesque Revue», un joyeux mélange de numéros de charme, d’arts du cirque et de chansons, et «Hotel Gl’amouresque», un spectacle de cabaret avec une brochette d’ex-girls du temple des revues berlinoises, le Friedrichstadtpalast, se jouent à guichets fermés.

Maîtresse de cérémonie en habits de lumière le week-end, Sheila Wolf s’appelle Wolf Teichert durant la semaine, et dirige une petite agence de communication. Marié, hétéro, père de famille, Wolf Teichert détonne dans l’univers très gay des drag queens – mais a su se faire sa place au sein de la communauté LGBT berlinoise. L’entertainer a même lancé au printemps dernier un grand raout qui conjugue le glamour du burlesque au piquant de la scène drag: le Boylesque Drag Festival Berlin. Sheila n’est d’ailleurs pas une inconnue en Suisse, où elle s’est déjà produite plusieurs fois, récemment à Genève et Bâle. Raison de plus pour faire sa connaissance.

– Quand as-tu inventé le personnage de Sheila Wolf et qu’incarne-t-elle pour toi?
– Mon alter ego était sans doute enfermé dans mon corps depuis ma naissance mais ce n’est qu’en 2004 que j’ai donné libre cours à Sheila. Tout a commencé avec la dose de courage indispensable et l’envie d’essayer quelque chose de nouveau: faire l’expérience, tout simplement, de ce que c’est d’être pris pour quelqu’un d’autre. Au début, Sheila était pour moi une sorte de soupape que je pouvais ouvrir à tout moment pour laisser retomber le stress et la pression. Autrement dit: c’était comme partir en vacances. Quand je me transformais en Sheila, c’était comme si je faisais du power yoga : ce temps passé devant le miroir me donnait la force d’oublier tout ce qui m’entourait. C’est différent aujourd’hui, bien que la phase de préparation, qui dure désormais trois heures, s’apparente toujours pour moi à une séance de relaxation. Aujourd’hui Sheila représente avant tout pour moi la possibilité d’entrer en contact avec des gens géniaux du monde entier. Les artistes sont pour moi une source d’énergie et d’inspiration, et j’aime beaucoup divertir les gens et les faire rire. Mon personnage est là pour leur faire oublier leur stress, du moins pour quelques heures.

– Certains de tes habits de scène sont très déshabillés, donnant l’illusion en-dessous que tu as le corps d’une femme. Quel est ton secret?
– Les magiciens n’expliquent pas leurs tours! Mais cela m’a pris beaucoup de temps de réussir à donner une parfaite nude illusion et de pouvoir porter des costumes laissant voir beaucoup de peau à la manière de Marilyn Monroe ou Marlene Dietrich. J’ai recours pour cela au body shaping et au contouring.

– À quoi ressemble ta garde-robe?
– J’ai désormais une pièce entière remplie de tenues, de costumes, d’accessoires et de perruques. Cela m’arrive encore de temps en temps de faire mes emplettes dans certaines boutiques rockabilly berlinoises, mais en général tous mes costumes sont réalisés sur mesure, selon mes souhaits. Il est de toute façon rare de pouvoir trouver du prêt-à-porter dans le domaine du burlesque : la plupart du temps, les costumes de scène représentent d’incalculables heures de travail passées à coudre des dizaines de milliers de sequins. Cela m’a d’ailleurs valu une hernie discale par le passé!

– As-tu eu des difficultés autrefois à te faire accepter dans la scène drag berlinoise, en tant qu’homme hétérosexuel?
– Je n’ai jamais crié sur tous les toits que je suis hétéro. Aujourd’hui encore, je n’en parle que si l’on me le demande, ou bien j’utilise ça comme gag sur scène, même si la plupart des gens ne me croient pas. Les gens ont du mal à réaliser qu’il y a plus que deux cases. Et cela vaut également pour la communauté gay. Certains ont visiblement du mal à cerner une drag queen hétéro passionnée de fringues comme moi. En ce qui me concerne, je déteste les cases. Elles ne servent qu’à une chose: s’y coincer les doigts!

– Tu as justement lancé un nouveau festival qui fait fi des cases au mois de mai, le Boylesque Drag Festival Berlin. Quelle était ton envie?
– Ce festival est en quelque sorte la quintessence de mes autres shows. Ma «Vaudeville Variety Burlesque Revue», au Wintergarten Berlin, est désormais une référence dans le monde du burlesque. On peut y voir les mêmes artistes que dans les shows de Dita von Teese ou du Cirque du Soleil. Nous fêterons la dixième édition en septembre, avec des stars du burlesque comme Dirty Martini, Perle Noire ou Rachel Reed. Je reçois désormais tellement de candidatures d’artistes du monde entier pour cette revue que j’ai décidé de lancer ce festival pour leur offrir la possibilité de se produire sur une grande scène. La seule obligation est de jouer un peu avec les rôles de genre. Les deux soirées s’étant vendues en totalité, je prévois d’agrandir le festival à trois soirées l’an prochain.

» sheila-wolf.de et boylesque-festival.de