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Billie, une vie fascinante, tragique et sulfureuse

Billie, une vie fascinante, tragique et sulfureuse
Billie Holiday dans les années 1940. Photo: Praesens Films

Un documentaire événement revient sur le parcours de la diva à la voix unique, symbole de la lutte contre le racisme, croqueuse d’hommes et de femmes.

C’est l’histoire, signée James Erskine, d’une artiste emblématique qui a changé le visage de la musique américaine et celle de la journaliste Linda Lipnack Kuehl, morte en essayant de la raconter. Née Eleonora Fagan à Philadelphie en 1915, fille d’un guitariste de jazz toujours absent et d’une aide-ménagère se prostituant à l’occasion, Billie Holiday, qui voulait chanter comme Armstrong jouait, a eu une vie fascinante et tragique.

Elle est marquée par la misère, la ségrégation qui l’obligeait à se maquiller pour s’éclaircir la peau, le viol à 11 ans par un voisin, de nombreux passages en prison et son addiction à la cocaïne et l’héroïne, où l’a entraînée son premier mari Jimmy Monroe, puis le deuxième. Croqueuse d’hommes dont beaucoup la frappaient et l’ont ruinée, Billie était aussi bisexuelle, s’assumant et s’affichant sans complexe.

Rencontres au sommet

L’existence chaotique de celle qu’on appelait parfois Mister Holiday, est aussi riche en rencontres au sommet. Géniale et sensuelle, elle doit certes son succès à sa voix extraordinaire, mais également aux collaborations exceptionnelles avec son grand ami Lester Young, qui l’a surnommée Lady Day, Louis Armstrong, Count Basie, Art Tatum, Benny Goodman, Miles Davis, Frank Sinatra…

Dans son documentaire événement rythmé par «Now And Never», «God Bless The Child», «My Man», «I Only Have Eyes For You» et bien sûr le militant «Strange Fruit», James Erskine revient sur le parcours agité et sulfureux de cette légende du jazz vocal au timbre unique, qui fut aussi la première icône de la protestation contre le racisme. Un itinéraire qui poussa la journaliste Linda Lipnack Kuehl à entreprendre, à la fin des années 60, d’écrire sa biographie.

Dix ans plus tard, Linda avait enregistré des entretiens avec les personnages extraordinaires qui ont jalonné la route d’une gamine des rues bagarreuse ballottée de maisons closes en maisons de correction, devenue la reine des clubs de jazz de New York. Sa ville de cœur où elle a débarqué en 1928, changé de nom, chanté avec Duke Ellington et Charlie Parker, s’est produite au Metropolitan Opera.

200 heures de témoignages

Elle y a surtout interprété, à 24 ans, au Café Society, «Strange Fruit», premier tube et poignant réquisitoire dénonçant les lynchages des Afro-Américains dans le sud des États-Unis. Les étranges fruits décrits étaient les Noirs pendus aux arbres de Géorgie ou d’Alabama. Mais c’est aussi dans Big Apple qu’elle a sombré dans la drogue, l’alcool, qu’elle s’est attirée de puissants ennemis et a eu de gros démêlés avec la justice.

Linda a recueilli 200 heures de témoignages incroyables comme ceux de Charles Mingus, Tony Bennett, Sylvia Syms, Count Basie, Sans oublier les amants, les amis, la cousine, les copains d’école de Billie et même les agents du FBI qui l’ont plusieurs fois arrêtée. Mais le livre de Linda n’a jamais été terminé et les bandes audio sont restées inédites… jusqu’à la découverte de l’équipe du film chez un collectionneur du New Jersey.

Ces 200 heures d’interviews ont été magnifiquement restaurées avec des images colorisées. Elles donnent un portrait captivant et bouleversant d’une Lady Day complexe, envoûtante. Hospitalisée en 1959 pour une insuffisance rénale, elle meurt le 17 juillet. Trois mille personnes ont suivi les obsèques de la star de tous les excès, à qui Diana Ross avait notamment rendu un bel hommage dans «Lady Sings The Blues». À revoir avant un prochain biopic, «The United States vs Billie Holiday».

Dès mercredi 30 septembre dans les salles