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Pixar accuse Disney de censurer ses contenus LGBT

"Luca", le Pixar de 2021 (Image d'illustration)

"Luca", le Pixar de 2021 (Image d'illustration) - Pixar

En marge d'une loi anti-LGBT votée en Floride, des employés de Pixar accusent Disney de brider leurs tentatives de montrer la diversité dans leurs films.

Des salariés de Pixar diffusent une lettre dans laquelle ils accusent Disney, leur maison-mère, de censurer leurs tentatives d'inclure des personnages LGBT dans leurs longs-métrages. Cette missive signée par "les employés LGBTQIA+ de Pixar et leurs alliés" intervient alors que les studios Disney sont critiqués pour leur inaction face à une législation considérée comme anti-gay qui agite la Floride.

"Chez Pixar, nous avons vu de belles histoires pleines de personnages divers revenir de lectures chez Disney réduites en miettes", écrivent-ils notamment dans cette lettre relayée par Variety.

Ils ajoutent: "Presque tous les moments d'affection gay sont coupés sur ordre de Disney, malgré les protestations des équipes créatives et des dirigeants de Pixar. Même si la création de contenus LGBTQIA+ était une réponse aux législations discriminatoires, nous sommes empêchés de les créer."

Tensions politiques

La grogne de Pixar s'inscrit dans un contexte politique tendu: mardi, le Sénat de Floride a voté une loi controversée qui interdit les enseignements sur l'identité de genre et l'orientation sexuelle dans les écoles primaires publiques. Surnommé "Don't say gay" ("Ne dites pas 'gay'", littéralement), ce texte qui s'appliquera aux classes de maternelle jusqu'au CE2 risque de porter préjudice aux jeunes de la communauté LGBT+, selon ses détracteurs. Il doit encore être signé par Ron DeSantis, le gouverneur républicain de Floride, favorable à cette initiative.

Comme le rapporte le Hollywood Reporter, Disney a fait l'objet de critiques ces dernières semaines pour son refus de prendre la parole, mais aussi parce que selon des médias américains, la société a fait des dons à certains élus favorables au texte. Le PDG de Disney, Bob Chapek, a finalement pris la parole lundi, dans une note interne transmise aux employés de Disney et Pixar, relayée par Variety. Il y assure son "soutien sans équivoque" aux "employés LGBT", précise que Disney a soutenu financièrement des politiques "qui se sont positionnés pour et contre cette législation", et a tenté de justifier son silence:

"Comme nous l'avons constaté à de nombreuses reprises, les déclarations de grandes entreprises ont très peu d'influence sur les changements d'opinions (...) Je suis persuadé que la meilleure manière pour notre société d'apporter un changement à long terme se trouve dans le contenu inspirant que nous produisons, la culture accueillante que nous créons et les organisations diverses que nous soutenons."

Réponse cinglante

Ces points n'ont pas convaincu les employés de Pixar, qui y répondent directement dans leur lettre. En commençant par l'affirmation selon laquelle "les grandes entreprises ont très peu d'influence sur les changements d'opinions":

"Ce même e-mail s'ouvrait sur une déclaration de la société sur la situation en Ukraine. Huit jours après le début (de l'invasion), Disney a suspendu la sortie de ses films dans les cinémas russes (...) À la suite de l'assaut du Capitole en 2021, Disney a arrêté toutes ses donations aux membres du Congrès qui s'étaient opposés au résultat de l'élection présidentielle (...) Il a été prouvé que les déclarations de Disney peuvent faire la différence."

Donation refusée

Ils concluent en appelant les leaders de Disney à "retirer immédiatement leur soutien financier aux législateurs à l'origine de la loi "Don't say gay", à s'opposer publiquement à cette loi, et à se racheter pour leur implication financière".

Mercredi, quelques heures avant la publication de cette lettre, Bob Chapek a pris la parole au cours d'une réunion avec des actionnaires pour annoncer un don de 5 millions de dollars à la Human Rights Campaign, un groupe de défense LGBT. Ces derniers ont refusé ce don "tant qu'ils ne verront pas (Disney) prendre publiquement position (...) pour que des propositions dangereuses (...) ne deviennent pas des lois dangereuses."

Depuis quelques années, Disney fait de premiers pas timides vers la représentation LGBT mais s'attire souvent plus de critiques que d'applaudissements. Le dernier volet de Star Wars devait marquer l'histoire avec le premier baiser lesbien de la franchise. Mais une fois en salle, il avait été qualifié de symbole opportuniste par les défenseurs des droits LGBT, tant la scène était furtive. Le film d'animation Pixar En avant, qui présentait une cyclope lesbienne, avait été censuré dans de nombreux pays du Moyen-Orient ainsi qu'en Russie.

https://twitter.com/b_pierret Benjamin Pierret Journaliste culture et people BFMTV