La première fois où j’ai accepté que j’étais gay, j’étais au lycée. C’était l’été entre la première et la terminale, je discutais beaucoup avec un garçon, et j’ai compris qu’il fallait que j’arrête de me mentir et de mentir à tout le monde. Ce moment de coming in, c’est-à-dire l’acceptation de mon homosexualité, a été en réalité un processus assez long, qui a commencé plusieurs années avant mon coming out. C’est déjà quelque chose de se permettre de mettre des mots sur ce qu’on ressent, de l’accepter, de le conscientiser.
Dès le début du collège, on me demandait si j’étais gay, en face à face, alors que je savais à peine ce que ça voulait dire. Par contre, j’avais déjà intégré la peur que ça arrive. Au collège, toute expression de féminité était moquée. A partir de là, ma technique de survie, c’était de me dire que personne ne se douterait de rien si je disais être amoureux d’une fille. Alors, de ma sixième à la classe de première, je disais des noms, je me persuadais d’être amoureux de ces filles. Entre la seconde et la première, je suis même sorti pendant six mois avec une fille.
Lorsque j’étais témoin d’homophobie, je ne disais rien, il ne fallait pas que je paraisse suspect. Il y avait le déni, j’avais compris que c’était dur d’être homosexuel. Mais parfois, j’étais très très bon copain dans ma tête avec certains garçons, je me souviens d’avoir même écrit une carte avec un gros cœur à un garçon avec qui je faisais du basket. Dans mon for intérieur, j’étais très conscient de ce qui se passait.
« Coming out » par e-mail
A 18 ans, je me suis senti obligé de parler à mes parents. J’ai fait mon coming out par e-mail, je savais que sinon j’allais être trop pris par mes émotions. Le lendemain, j’en ai discuté avec eux. Et comme souvent, ce n’est pas la première discussion la pire. Ils m’ont dit que cela les rendait tristes, qu’ils savaient que la vie allait être dure pour moi. Mes parents sont profs, et ils étaient très peu à l’aise pour parler d’homosexualité. C’était souvent dit sur le ton de la rigolade, mais en substance, c’était : « si ça arrive chez les autres pas de problème, mais pas chez nous. » Même si je n’ai jamais eu peur d’être totalement rejeté, je sentais que c’était mieux si je n’étais pas gay.
Petit, j’étais attiré par le féminin. C’est tout bête, mais, par exemple, quand on allait chez McDo, je voulais le jouet pour les filles. Je regardais des dessins animés destinés aux filles, comme les Winx… Dans la petite enfance, ce n’était pas vraiment un problème pour ma grand-mère ou pour ma mère. Du côté des hommes de la famille, je sentais que ça dérangeait un peu plus. Le dimanche, ma mère et ma grand-mère restaient dans la cuisine à discuter tandis que mon père et mon grand-père regardaient le match de foot. Et puis vers 8 ans, je n’ai plus eu le droit de rester dans la cuisine.
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