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Des collectifs LGBT jugent la marche des fiertés "trop blanche"… et trop policière
Des associations veulent lancer une contre-marche des fiertés.
© Lucas Boirat / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Des collectifs LGBT jugent la marche des fiertés "trop blanche"… et trop policière

Divisions

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Selon le média « 20 Minutes », des collectifs LGBT préparent une marche des fiertés alternative à celle prévue le 26 juin 2021. Objectif : proposer un rassemblement antiraciste et anticapitaliste le 20 juin. Une décision qui ferait suite à des divergences concernant les revendications à porter.

Le mouvement LGBT se dirige-t-il vers une scission ? On pourrait le penser au vu de l'appel pour une marche des fiertés alternative à la traditionnelle manifestation organisée par l'Inter-LGBT prévue le 26 juin.

Selon une information du média 20 Minutes, près de quinze collectifs, associations et un syndicat préparent une manifestation pour le 20 juin qui se présente comme « antiraciste et anticapitaliste ». Auprès de nos confrères, Pierrette Pyram, qui représente Diivines LGBTQI+, l'une des premières signataires, dénonce « l’organisation de l’Inter-LGBT » qui serait « quasiment entièrement blanche ».

Parmi les différents griefs, la militante évoque un refus de diffuser du zouk. Pour le bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants (BAAM), également partie prenante de la manif dissidente, la présence d'un char de « Flag ! » notamment constitué de policiers et gendarmes LGBT est un problème. « On va demander à des gens de défiler à côté d’agents qui les contrôlent toute la journée », dénonce la présidente de l'association, toujours auprès de 20 Minutes.

Sont également dénoncés le « racisme systémique », « l'islamophobie d'État » ou encore la loi bioéthique considérée comme « raciste, validiste et transphobe ».

Question migratoire

« Il faut rappeler au niveau collectif quels sont les enjeux majeurs qui affectent une partie de la communauté LGBT » explique Giovanna Rincon, directrice de l'association Acceptess-T. Cette dernière a été annoncée comme participante à la marche « une erreur importante de l'article car nous n'avons rien décidé encore ».

Pour autant, la démarche ne lui semble pas dénuée de sens. « Il faut avant tout discuter avec l'Inter et voir si pour eux, les enjeux de l'immigration, des contrôles policiers ou encore la précarité sont prioritaires. Nous sommes partants pour un nouveau départ derrière ces questions » affirme-t-elle. D'ailleurs, elle rappelle que « la marche revendique globalement les droits civiques, il est normal d'être sensibles à la question migratoire ».

Visibilité lesbienne

« Ce mouvement est construit autour d'hommes blancs et bien installés dans la vie » déplore Guy Héranval membre du bureau du centre LGBTQI+ de Paris, lequel n'a pas encore statué sur sa présence à la marche. Il ne voit pas de scission dans l'initiative, plutôt « la volonté de faire entendre une autre voix ».

Mais l'immigration et autres revendications ne s'écarteraient-elles pas de l'essence de la marche, à savoir la défense de la communauté LGBT ? Pour Guy Héranval, il s'agirait d'une suite logique. « L'étrange et l'étranger nous est familier, on observe des thématiques qui prennent de l'importance comme la cause des migrants ou même la visibilité lesbienne qui nous semblent importantes ».

Scission du mouvement ?

Une partie des associations dissidentes participaient traditionnellement à la marche des fiertés. Pour autant « elles n'étaient pas membres » tient à préciser Matthieu Gatipon-Bachette, porte-parole de l'Inter-LGBT. Ce dernier semble surpris par les accusations portées. « Notre organisation est démocratique, chaque association peut demander à l'intégrer et participer au processus de décision » détaille-t-il.

À ses yeux, tout cela relève d'un « mauvais procès ». « Ceux qui s'intéressent à notre organigramme verraient que nous n'avons pas à rougir de la diversité dans nos rangs. » Le porte-parole déplore aussi, sur la forme : « un texte frontal ». « On déplore qu'ils ne soient pas venus enrichir le débat et travailler avec nous. »

Divisions

Le mouvement serait-il en train se fracturer ? Un premier épisode de ces tensions s'est déroulé début mai. Le Centre LGBTI de Touraine avait alors annoncé un cortège dont la tête répondrait aux critères de « non-mixité ». Le message relayé sur leur compte Instagram interdisait la présence de « toute personne blanche », précisant que les blancs qui insisteraient se feraient « cordialement (ou non) dégager ». Les organisateurs ont ensuite plaidé une maladresse, assurant que ce message provenait du Comité antiraciste de Tours et qu'il avait été partagé par erreur sur le réseau social. Le rendez-vous a finalement été annulé en raison de menaces pesant sur les participants à la manifestation.

Pour Matthieu Gatipon-Bachette, il est important de distinguer des « gens qui, légitimement, veulent sincèrement faire progresser la visibilité des minorités au sein du mouvement » avec des associations qui « instrumentaliseraient ces combats » et alimentent « des conflits bien plus politiciens ».

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne