Interrogée sur la possibilité qu’une femme transgenre puisse être reconnue comme la mère de sa fille de 6 ans sans passer par l’adoption, alors même qu’elle est son père biologique, la Cour de cassation a répondu par la négative, mercredi 16 septembre. Dans son arrêt, la plus haute juridiction française laisse deux options à Claire (tous les prénoms sont modifiés) pour faire reconnaître sa filiation : adopter son enfant ou faire établir sa paternité. Deux solutions qu’elle refuse catégoriquement.
« Cet arrêt est un scandale, une véritable occasion manquée », a commenté lors d’une conférence de presse l’avocate de Claire, Clélia Richard, qui l’accompagne depuis des années. Elle avait pourtant l’espoir que le long parcours judiciaire de sa cliente s’achève enfin, après que l’avocate générale avait déclaré, lors de l’audience qui s’était tenue en juin devant la Cour de cassation, que « oui, Claire est une femme et Claire est une mère ».
« C’est la première fois que les choses ont été dites simplement », avait alors commenté Claire, venue assister à l’audience avec ses parents, sa femme et leur fille. Trois mois après, à l’annonce de la décision, elle a réagi par la voix de son avocate en déplorant que « la justice se montre immobile et figée comme souvent ». « Cela veut dire qu’aujourd’hui une petite fille de 6 ans va garder sur son acte de naissance une seule mère, celle qui a accouché. L’autre n’apparaît pas. C’est abject », estime Me Richard.
« Un retour à une conception biologiste »
« Cet arrêt signe un retour à une conception biologiste, c’est un véritable recul », a ajouté, à ses côtés, l’avocat près de la Cour de cassation Bertrand Périer, qui représentait dans cette affaire l’Association des parents et futurs parents gays et lesbiens (APGL) et l’Association commune trans et homo pour l’égalité (Acthé). « C’est très grave pour les personnes trans, on les ramène à leur identité d’origine alors même qu’elles ont obtenu la reconnaissance de leur nouveau genre », a-t-il déploré.
Par cet arrêt, la Cour de cassation casse et annule la décision rendue le 14 novembre 2018 par la cour d’appel de Montpellier, qui avait imaginé que figure sur l’acte de naissance de l’enfant la notion de « parent biologique ». Une invention juridique qualifiée en juin par Me Périer dans sa plaidoirie d’« objet juridique non identifié », et dont la création même disait quelque chose de cette histoire familiale hors norme.
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