Photo d'un drapeau arc-en-ciel, symbole de la communauté LGBT, brandi à Durban (Afrique du Sud), le 30 juin 2018

En 2019, les forces de police et de gendarmerie ont recensé 1870 victimes d'infractions à caractère anti-LGBT, soit 36% de plus qu'en 2018.

afp.com/RAJESH JANTILAL

Faut-il tracer une carte de France de l'homophobie ? C'est en tout cas l'objectif d'une nouvelle application pour smartphone, "Flag!", soutenue par le gouvernement, qui permet de signaler et de localiser anonymement les actes anti-LGBT. Initiatrice du projet, l'association LGBT Flag!, constituée d'agents des ministères de l'Intérieur et de la Justice, veut orienter les politiques contre ces discriminations. Son président, Johan Cavirot, l'assure, "si une vague de signalements parvient d'une ville, il sera possible de contacter la mairie ou le commissariat. En cas de violences familiales, il faudra renforcer la prévention à l'école. Ou dans l'entreprise, si elles surviennent au travail."

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Précis, le formulaire permet aussi de rapporter des faits qui ne sont punis par la loi, comme le "mégenrage" qui consiste à nier ou se tromper sur l'identité de genre d'une personne. Si les dénonciations nominatives sont proscrites, l'application suggère une liste d'items pour caractériser l'auteur de discriminations parmi lesquels "policier", "pompier", "personnel hospitalier" et même "supporteur"...

"Il ne faut pas cacher la vérité"

Comme un air de surveillance citoyenne ? C'est ce que craignent plusieurs acteurs associatifs : "Ces données ne doivent pas servir à stigmatiser des quartiers sensibles, parfois perçus comme hostiles aux LGBT", souligne Giovanna Rincon, d'Acceptess-T, qui défend les personnes trans. Réponse de Lyes Alouane, militant de Stop Homophobie, à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) : "Il ne faut pas cacher la vérité, au moins ces chiffres seront factuels." A condition qu'un panel suffisant s'en empare. En un mois, "Flag!" a été téléchargée 1500 fois et a enregistré 200 signalements. La phase suivante prévoit son extension à l'intranet des entreprises publiques, si les autorisations sont données.

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Pour Frédéric Potier, à la tête de la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT, qui finance l'outil, "la carte complétera d'autres indicateurs : les appels aux associations, peu implantées hors des grandes villes, et les plaintes. Les territoires où ces dernières sont le plus nombreuses ne sont pas forcément plus intolérants : dans des zones très rurales ou en outre-mer, la pression sociale peut être si forte que les victimes se taisent. Aucun quartier n'a le monopole de l'homophobie."

La prudence dans l'interprétation des chiffres de la Place Beauvau s'impose également : + 36 % d'infractions anti-LGBT en 2019. Une tendance répétée chaque année depuis la création du baromètre, en 2017. "Les avancées sociétales créent des phénomènes de rejet, explique Frédéric Potier. Mais le travail associatif et la formation des policiers pour mieux prendre les plaintes entraînent aussi mécaniquement une hausse des dépositions."

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