LGBTphobie"Le policier a dit que c'était de notre faute" : Safir raconte son agression homophobe à Lille

Par Rozenn Le Carboulec le 30/12/2018
agression homophobe

Le 26 décembre dernier vers 20h, Safir* et son compagnon ont été agressés dans le centre-ville de Lille, alors qu'ils se rendaient au restaurant. Le jeune homme raconte sa violente agression à TÊTU.

Le 26 décembre dernier, Safir* venait de fêter Noël en famille à Lille avant de rejoindre son compagnon pour dîner. Les deux hommes se retrouvent à la gare et prennent le métro. Mais lorsqu'ils sortent à la station République Beaux-Arts, ils sont pris à partie par un groupe : "Trois gars ont commencé à nous insulter de pédés puis se sont mis à nous taper", raconte Safir à TÊTU. L'homme de 34 ans, qui habite à Montpellier, ne se laisse pas faire : "Je fais de la boxe, je sais me défendre", rapporte-t-il. Leurs agresseurs finissent par prendre la fuite, laissant Safir le visage ensanglanté.

Ce soir-là, les rues du centre-ville de Lille sont pleines de monde. Mais personne n'est venu au secours du couple. Pas même les forces de l'ordre, qui, d'après Safir, ont assisté à la scène : "Il y avait trois policiers juste à côté, à 30 mètres à peine. Ils n'ont pas bougé. Quand les agresseurs sont partis en courant, en passant devant eux, ils ne les ont même pas interpellés", affirme-t-il.

"Le policier a dit que c'était de notre faute"

Safir et son compagnon se rendent dans la foulée au commissariat central pour déposer plainte. Ils échangent avec un policier via un interphone : "Il n'a pas voulu nous laisser entrer. Il a dit qu'il n'y avait pas assez eu de coups et que c'était de notre faute. Que nous n'avions qu'à pas nous montrer dans le centre-ville car c'était de la provocation".

Des propos que les deux hommes ont vécu comme une seconde violence homophobe : "Dès qu'on a dit qu'on était un couple homo, c'était fini", rapporte Safir. Ecoeuré, il décide de retourner directement chez lui, à Montpellier.

"On se tenait juste par le bras"

Si le jeune homme a décidé de témoigner aujourd'hui, c'est "pour que les gens sachent ce qui se passe" : "On se tenait juste par le bras, même pas par la main !". Cinq ans après la légalisation du mariage pour tous et toutes, il confie "ressentir un mélange de dégoût et de rage". "J'ai l'impression qu'on régresse. Avant je sortais avec des tenues bien plus extravagantes et je n'ai jamais subi d'agression homophobe", regrette-t-il.

Sur Twitter, Martine Aubry, la maire de Lille, a dit apporter son soutien à Saphir et son compagnon.

Une plainte pour homophobie

Selon La Voix du Nord, une enquête a été ouverte à Lille pour retrouver les agresseurs et déterminer pourquoi la plainte de Safir n'a pas été enregistrée. Une autre question se pose : pourquoi les policiers qui, selon le jeune homme, ont assisté à la scène, ne sont pas intervenus ? Dans un communiqué, le préfet de la région Hauts-de-France a apporté son soutien aux victimes et a assuré "mettre tout en oeuvre pour inculper les agresseurs".

Le samedi 29 décembre, Safir a finalement pu porter plainte à Montpellier. "On m'a reçu avec respect. J'ai été accueilli comme un se doit, comme n'importe quel citoyen français", rapporte-t-il. Sur le procès verbal, que TÊTU a pu consulter, l'infraction est reconnue comme "une violence à raison de l'orientation sexuelle", et le mobile d'"homophobie" a bien été retenu. Safir a quant à lui appris qu'il avait deux côtes fêlées. Il a écopé de 20 jours d'arrêt maladie et de quatre jours d'incapacité temporaire de travail, qui vont être reconduits.

https://tetu.com/2018/08/17/policiers-formes-aux-questions-lgbt-galere-depot-de-plainte-homophobie/

*Safir est un pseudo.

Article mis à jour le 2 janvier 2019 à 13h55.

Crédit photo : Safir.