LGBTphobie"Ton pédé de fils, on va le crever" : une violente agression dans le nord de la France

Par Elodie Hervé le 21/05/2020
Homophobie

Un jeune homme de 19 ans et sa famille ont dû fuir leur maison du nord de la France après une violente agression sur fond d’homophobie. 

“Je ne sais plus exactement quand ni pourquoi cela a commencé", raconte L., 19 ans. "Mais je me souviens qu’ils ont dit à ma mère 'Ton pédé de fils, on va le crever'". C’était en août 2019. Ce devait être un nouveau départ. L., son grand frère, sa petite sœur et sa mère emménagent dans une petite maison du nord de la France. Mais très vite apparaissent des tensions avec une famille voisine. Des insultes, des propos homophobes et sexistes. Des crachats aussi. "Clairement, ils ont cherché à nous faire partir et ils ont réussi".

"Ils ont traité ma mère de pute et moi de pédé"

Dans sa famille, L. ne cache pas son homosexualité. Son coming-out s’est très bien passé et il ramène des copains sans que cela ne soit une source de tension avec sa mère. Mais pour leurs voisins homophobes, ça ne passe pas. Les insultes sont fréquentes. "Ils ont commencé à traiter ma mère de pute, et moi de pédé. Ils ont dû me voir avec un garçon ou maquillé. Et je pense que c’est une excuse pour leur déchaînement de haine".

Les semaines passent et se ressemblent. Jusqu’au déconfinement. Le premier vendredi, pour le dîner, ils invitent des amis à la maison. "J’étais avec deux copains. On est allés nourrir les chats de la maison d’en face. On s’entend bien avec les propriétaires et ça arrive souvent que l’on s’occupe de leurs animaux". Mais au moment de rentrer chez lui, L. panique. Ses voisins semblent bien décidé à l'empêcher, lui et ses amis, de rejoindre son domicile. "J’ai appelé ma mère pour la prévenir et lui dire de venir nous aider." Celle-ci se met à la fenêtre et reçoit un cendrier en pleine tête. "Je pense qu’à ce moment-là, on a tous perdu notre sang-froid".

Des deux côtés, les familles commencent à s’envoyer des objets. Les assiettes volent, les poubelles aussi. Les menaces de mort et les insultes homophobes fusent en direction de L..

Sept blessés

Le lendemain, sa sœur passe avec son mari et son enfant en fin de journée. Dans le jardin, la famille profite de ce moment de retrouvailles et tente d’oublier les évènements de la veille. "Et là, on a commencé à recevoir des dalles en pierre, des tuyaux en PVC et des insultes". Le barbecue est renversé sur sa sœur et son enfant. La baie-vitrée de la maison est cassée.

L. tente de prendre en charge sa sœur et son enfant. Les évènements s’enchaînent. Jusqu’au moment où sa mère sort de la maison pour appeler à l’aide. "Ils se sont rués sur elle, et l’ont frappée sans relâche". Aux coups, s'ajoutent les menaces de mort. "Sale pédé, tu vas crever et toi la pute, on va te tuer !" L. rend les coups, se défend comme il peut. Jusqu’au moment où les voisins s’en mêlent. Très vite, cela devient incontrôlable. Les objets valsent. Les coups pleuvent. Les insultes fusent.

La police, les pompiers finissent par arriver. Au total, sept personnes ont été blessées, selon les pompiers. Dont un grave : son beau-frère qui a reçu un jet de couteau dans le corps. Celui-ci a dû être médicalisé sur place avant d’être héliporté au centre hospitalier le plus proche. Ses jours ne sont plus en danger. Sa mère aussi est évacuée à l'hôpital en état de stress très important, des bleus sur tout le corps. Elle ressortira le soir même avec une côte cassée, un œil au beurre noir et une angoisse écrasante.

Motif d’homophobie pas retenu

Plusieurs plaintes ont depuis été déposées pour violences en réunion et dégradation de biens. La gendarmerie a aussi ouvert une enquête pour tenter de comprendre ce qu’il s’est passé. "A ce stade, la qualification d’agression homophobe n’est pas retenue", précise le parquet qui parle d’un différend entre deux familles, d’une "mésentente récurrente dont l’origine reste inconnue". L’enquête est toujours en cours, continue le parquet qui appelle au calme. Un homme identifié comme le porteur du couteau a été placé en garde-à-vue puis déféré, lundi. Il sera convoqué en octobre.

L. et sa famille, se sont réfugiés chez des amis, le temps de retrouver un endroit où vivre. Mais depuis, les insultes homophobes se sont déplacées sur les réseaux sociaux.

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