musiqueCorine : "La scène LGBT m'a adoptée dès le départ"

Par Alexis Patri le 10/07/2019
Corine

À quelques mois du festival Paris est TÊTU, rencontre avec l'artiste la plus drôle, kitsch et chevelue de la programmation de cette première édition.

Si les rues de Paris sont un podium de mode, elle est indispensable au défilé. Personnage scénique solaire et ultra-looké, Corine arrive dans le café du 19ème arrondissement où nous avons rendez-vous sur une paire de Louboutin à talons carrés transparents et lanières irisées. A faire pâlir d'envie toutes les drag-queens de la capitale. Dès les premières phrases, où la chanteuse complimente notre vernis à paillettes, sa chaleur humaine et sa sincérité donnent le ton de l'interview. La chanteuse kitsch, nourrie à l'italo-disco nous a parlé de Juliette Armanet, du public LGBT, ou du festival Paris est TÊTU où elle se produira en septembre prochain.

TÊTU : Sans que tu n'ailles chercher ce public de manière directe, tu as de nombreux fans parmi la communauté LGBT, et particulièrement chez les hommes gays. Pourquoi Corine c'est pédé ?

Corine : Elle éclate de rire. J’ai écrit mon premier album pour faire danser les gens, mais je ne pensais pas à toucher la scène LGBT, que je connaissais peu. Je peux te dire qu'elle m’a adoptée dès le départ. Et même filé un coup de main. Dès que j’ai sorti « Pourquoi Pourquoi », j’ai été invité à la Madame Claude (soirée LGBT parisienne, ndlr), au Monko Cabaret, chez Madame Arthur, la Garçon Sauvage à Lyon… Je suis tombée en amour de ces soirées-là, j'avais l’impression de revivre un clip de Prince. Ce sont des endroits très tolérants et où les gens lâchent prise. Ils viennent pour danser, pas pour se regarder.

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Crédit photo : Alexis Patri pour TÊTU

Qu'est-ce qui, dans ta musique et ton personnage, nous touche selon toi ?

Peut-être la liberté de ton, l’humour. Le fait que je joue avec mes formes et ma féminité, aussi. J’espère que les gens comprennent mon personnage et le recul que j’ai. Dans mes chansons, je parle du quotidien de manière faussement ingénue, mais ça raconte d’autres choses : ce que c’est que d’être une femme, les différences, le fait d’être ensemble… Je crois que ma musique parle aussi aux clubs et au milieu de la nuit.

Fin avril, tu présentais en exclu sur TÊTU le clip de "Corine", une reprise d'une chanson du groupe AS Dragon sortie en 2005. Comment as-tu choisi ce titre plutôt confidentiel ?

C’est vrai que c’est très indé. C'est Marc Collin, mon producteur, qui m’a proposé cette reprise. Ce qui m’a plu, c’est que la chanson originale parle de cocaïne, mais que je peux la chanter comme une confession intime sur le double et l’identité. Quelque chose de très présent dans mon travail. Natacha Lejeune (la chanteuse d’AS Dragon, ndlr) m’a toujours touchée. C’est une artiste très punk, qui donne tout sur scène.

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"Je suis autant touchée par la beauté des mecs que celles des femmes."

On parle beaucoup de ton inspiration italo-disco. Il y a quoi comme "derniers artistes écoutés" dans le téléphone de Corine ?

À force d’entendre parler de Billie Eilish, j’ai écouté son album et j’ai beaucoup aimé. Tout comme le dernier album d’Anderson .Paak. Je suis très fan de sa sexyness. Il a quelque chose d’assez atypique dans ses prods, comme Frank Ocean. J’ai aussi vu Parcels à Solidays et j’ai écouté en boucle le lendemain. C’est parfait pour l’été. Et côté français, j’apprécie vraiment la nouvelle scène : Feu! Chatterton, Radio Elvis, Minuit et Suzane, qui est incroyable sur scène. Et mes copines évidemment, comme Fishbach.

Dans "Il fait chaud", tu chantes "Je mate les filles, je mate les mecs ». Tu l'as écrit uniquement pour la rime ?

C’est l’humour dont je te parlais, l'idée de jouer avec une ambiguïté. Je suis pas homo, mais il y a plein de filles que je trouve sublimes. Je suis autant touchée par la beauté des mecs que celles des femmes. Elles sont souvent fascinantes.

Tu as fait un duo avec une chanteuse qui obsède un peu la rédaction, on l'écoute tous les vendredis après-midi, c'est Juliette Armanet. La dimension crypto-lesbienne d' "Épopée Solaire", c'était volontaire...

Oui, on s’est beaucoup amusées à créer ce titre ! « Épopée Solaire » parle autant d’amitié que d’amour. Je voulais qu’on se fasse une déclaration l’une à l’autre, parce que je rêve d’être comme Juliette : petite, brune, les cheveux lisses, des petits seins. On a écrit le texte à quatre mains, en échangeant des idées pendant 6 mois. Juliette a amené une pâte plus onirique. Au fil de l'écriture, la chanson est devenue beaucoup plus héroïque, comme une aventure commune. Avec Juliette, il y a une évidence : elle est artiste jusqu’au bout des ongles. Elle sera toujours là. J’ai hâte qu’elle sorte son deuxième album.

"Paris est TÊTU va être une grande fête où l'on va vraiment se faire plaisir !"

Il y d'autres artistes avec qui tu aimerais travailler comme ça ?

Plein ! Lady Gaga. Si tu pouvais l’appeler ce serait sympa (rires) ! En France il y en a avec lesquels on commence à discuter. Mais je ne veux pas en dire trop. J’aime bien l’idée que le public découvre les choses au fur et à mesure qu’elles sortent.

Tu es programmée au festival Paris est TÊTU en septembre. Tu as été étonnée que l'on vienne te chercher sur ce projet ?

Pas vraiment. Comme je te le disais, j’ai fait plusieurs soirées queer. J'ai aussi fait la Magical Pride de Disney, on m’a proposé la Marche des Fiertés à Paris, mais j’étais en concert dans le Sud. Mais je suis évidemment très contente d’être à l’affiche de Paris est TÊTU, c’est une superbe initiative ! TÊTU, c’est un nom mythique et la programmation est top. Ça va être une grande fête où l'on va vraiment se faire plaisir. 

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À tes débuts, tu as dû beaucoup expliquer ton personnage, que tu comparais à ceux qu'ont eus Bowie et Madonna. Corine peut-elle prendre une direction complètement inattendue ?

C’est vrai qu’au début les questions étaient très centrées sur mes cheveux... Mais c’est juste un apparat de scène, pas un projet marketing ! (elle lève les yeux au ciel. Ou vers ses cheveux?) Corine va évoluer, mais ça se fera naturellement. Matthieu Chedid a toujours eu ce truc de transformation pour la scène. Je n'ai pas l'impression qu'on lui en ait autant parlé. Je fais simplement partie de ces artistes expressionnistes. Et les questions sur le réel et l’irréel de Corine, on s’en fout un peu, je crois. 

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Crédit photo : capture YouTube

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Retrouvez Corine au festival PARIS EST TÊTU les 21 et 22 septembre prochains, au Jockey Disque de l'Hippodrome d'Auteuil ! 

 

Crédit photo : Shelby Duncan