politiqueAprès trois mois au ministère de l'Égalité, le conseiller aux questions LGBT+ Grégory Prémon quitte ses fonctions

Par Nicolas Scheffer le 16/11/2020
Grégory Prémon

INFO TÊTU - Le conseiller aux questions LGBT+ d'Élisabeth Moreno quittera son poste le 18 novembre. Il avait été embauché il y a à peine trois mois. Le ministère évoque une promotion, mais les militants s'interrogent.

Il devait être le spécialiste des sujets LGBT+ au sein du gouvernement. Pour la première fois, le ministère de l'Égalité disposait d'un conseiller dédié à ces sujets. Grégory Prémon, ancien militant de SOS homophobie qui a fait carrière au ministère de l'Éducation, quittera celui de l'Égalité le 18 novembre. Il "va rejoindre très rapidement son administration d'origine, l'Éducation nationale", car il doit prendre le poste de directeur académique adjoint à Paris. Une promotion pour certains, quand d'autres s'étonnent de cette soudaineté.

"Grégory Prémon est venu pour préparer le plan national d'actions pour l'égalité des droits, contre la haine et les discriminations anti-LGBT+ (2020-2023). Un plan ambitieux a été présenté le 14 octobre dernier. Son expertise était nécessaire pour construire une stratégie qui répond aux besoins des personnes LGBT+", indique une source gouvernementale. "Grégory a fait un super boulot avec le plan national. Son ministère d’origine lui propose une belle opportunité, je suis un peu triste de le voir partir, mais je comprends tout à fait", complète Frédéric Potier, délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT+.

"Grégory Prémon a su convaincre qu'il ne fallait pas tergiverser"

En trois mois, il a donc pu finaliser et présenter le plan d'action du gouvernement jusqu'en 2023. Ce plan était attendu de longue date, d'autant qu'il a été repoussé plusieurs fois en raison de l'épidémie de coronavirus. "Grégory Prémon a dû convaincre qu'il fallait sortir le plan maintenant, qu'il ne fallait pas tergiverser", souligne Frédéric Potier. Le délégué interministériel se satisfait de voir que l'expertise sur les sujets LGBT+ est prisée des autres administrations, comme le prouve cette "promotion".

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Pourtant, trois mois après son arrivée au ministère, ce départ entériné par le Journal Officiel, paraît précipité. Certes, Grégory Prémon a pu participer à la finalisation de la stratégie gouvernementale. Mais son ambition allait bien plus loin qu'un vade mecum de ce qu'il faut faire pour lutter contre les LGBTphobies. Alors qu'il prenait ses fonctions, il insistait auprès de TÊTU sur la nécessité de la continuité des politiques de lutte contre les LGBTphobies. "C'est le jeu des administrations. Cela arrive régulièrement qu'un conseiller soit débauché rapidement après avoir pris un poste", évacue le préfet Potier.

Un conseiller durement attaqué

Il n'empêche que certains acteurs de la lutte contre les LGBTphobies s'interrogent. "Soit il a perdu des arbitrages, soit il a compris qu'il ne pouvait pas faire avancer ces questions-là au sein du ministère", croit savoir Lennie Nicollet, président de HES (Homosexualité et socialisme). Le conseiller municipal de Romainville fait allusion notamment aux mesures prises pour  protéger les personnes LGBT+ lors du reconfinement.

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Grégory Prémon a récemment été durement attaqué pour avoir négligé les associations de travailleur·e·s du sexe et des personnes trans dans le tour de table des besoins. Ces mesures se limitent à rappeler les numéros d'urgence des associations et à financer des nuits d'hôtel pour les personnes en grande fragilité. "Je serai bien incapable de dire s'il y a un lien et qu'il a jeté l'éponge ou s'il y a une autre raison", tempère Raphaël Gérard, député LREM de Charente-Maritime très actif sur les questions LGBT+.

Quoi qu'il en soit, le ministère étudie déjà des candidatures pour remplacer Grégory Prémon. En attendant, ses fonctions seront assurées par le directeur de cabinet d'Élisabeth Moreno, Grégoire Potton. Les associations appréciaient l'écoute de Grégory Prémon, un conseiller qui connaît bien les problématiques des personnes LGBT+ et qui sait utiliser les rouages de l'administration pour parvenir à ses fins. Un profil rare.

 

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