Livre. Le « voyage en terres queers » dans lequel nous entraîne Cy Lecerf Maulpoix débute en 2015 quand il s’engage, à quelques mois de la COP21, dans la lutte écologiste. Cette première expérience militante est frustrante pour le jeune gay d’alors 25 ans, immédiatement confronté à un monopole des hommes hétérosexuels sur la parole, qui craignent un « détournement des enjeux écologistes au profit de politiques minoritaires ». En miroir, nombre de militants LGBTQI (lesbiennes, gay, bis, trans, queers et intersexes) que l’auteur côtoie voient en l’écologie la « lutte de celleux qui n’auraient pas (…) d’autres oppressions contre lesquelles résister », quand eux s’engagent sur des « urgences “concrètes” vécues ».
C’est en cherchant à résoudre cette tension intime entre une « politique du futur » et une « politique du présent » qu’il a l’intuition de « croisements possibles entre luttes LGBTQI et écologie ». Journaliste indépendant, Cy Lecerf Maulpoix part alors en quête de militants, de philosophes, d’artistes en marge de l’hétérosexualité – et souvent de la binarité femme-homme –, dont les « vies déviantes » dessinent les contours d’une « écologie queer », nécessairement « féministe, intersectionnelle, anticapitaliste et décoloniale ».
L’auteur prend part aux mobilisations où se construisent ces « écologies déviantes », se joint aux « gilets jaunes » et manifeste contre la réforme des retraites. Dans ces luttes, les LGBTQI sont de plus en plus visibles, important des stratégies héritées du militantisme d’Act Up, de l’« écoféminisme d’action directe » de Françoise d’Eaubonne, des « grands écosabotages antinucléaires » des années 1979-1980 et « des briques lancées à Stonewall ». Des coups d’éclat et des violences symboliques, parfois en rupture avec la « généalogie en partie fantasmée de révolutions pacifistes » qui habite les mouvements écolos.
Tonalité ésotérique
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