MUSIQUELe groupe Mashrou' Leila se sépare, la fin d'un symbole des luttes LGBTQ+

Le groupe libanais Mashrou' Leila se sépare, une onde de choc pour la communauté LGBTQ+ du Moyen-Orient

MUSIQUEDevenu au fil des années un symbole de lutte contre les LGBTphobies et l'extremisme religieux, le groupe d'origine libanaise Mashrou' Leila a annoncé via son chanteur Hamed Sinno sa séparation
Le groupe Mashrou' Leila lors d'un concert à Dubaï en 2017
Le groupe Mashrou' Leila lors d'un concert à Dubaï en 2017 - KARIM SAHIB / AFP / AFP
Pauline Ferrari

Pauline Ferrari

L'essentiel

  • Le groupe de rock alternatif libanais Mashrou' Leila a annoncé sa séparation par l’intermédiaire de son chanteur et leader, Hamed Sinno.
  • Ouvertement pro-LGBTQ +, Mashrou' Leila a connu un succès très rapide auprès de la jeunesse arabe, de l’Egypte à la Jordanie en passant par le Liban.
  • Au fil des années, le groupe a été banni de plusieurs pays pour « blasphème » ou pour « atteinte aux bonnes mœurs ».

C’est une annonce qui signale la fin d’une époque : pendant plus de dix ans, le groupe de rock alternatif Mashrou' Leila a arpenté les scènes du Moyen-Orient, de Rabat à Beyrouth en passant par Le Caire. Après plusieurs années sans concerts, en raison notamment de la pandémie de Covid-19, le groupe s’était fait plus rare dans les médias. Mais dans un podcast diffusé sur YouTube le 11 septembre dernier, son leader et chanteur Hamed Sinno avait annoncé que les membres du groupe « n’envisageaient pas de retravailler ensemble ». Ce qui sonne, pour l’heure, la fin de Mashrou' Leila.

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Le groupe, formé en 2008 au sein de l’Université Américaine de Beyrouth au Liban, est rapidement devenu majeur sur la scène alternative du monde arabe, en raison de son pop rock mélodique et de ses paroles explorant les thématiques féministes et LGBTQ +, les luttes sociales ou politiques. Son chanteur, Hamed Sinno, ouvertement gay, est rapidement devenu un porte-drapeau de la communauté LGBTQ + du Moyen Orient et de sa diaspora. Cinq albums plus tard et des dizaines de concerts à travers le monde, Mashrou' Leila tire sa révérence.

Une histoire tumultueuse avec instances politiques et religieuses

Un succès qui a rapidement dépassé les frontières du Liban, le groupe gagnant un public de plus en plus important dans tout le monde arabe. Mais leurs passages attirent les foudres des conservateurs religieux, notamment catholiques, les accusant de « blasphème » et d' « atteintes aux mœurs ». Le groupe est victimes d’attaques homophobes en ligne et à chaque concert. En Jordanie, leurs performances ont été annulées en 2016 et 2017, à la suite de protestations de parlementaires, se suivant d’une interdiction de scène. En 2017, le groupe est banni en Egypte, après un concert réunissant 35 000 personnes au Caire : dans le public, des spectateurs avaient brandi des drapeaux arc-en-ciel, et les images ont été postées sur les réseaux sociaux. À la suite de ce concert, les autorités égyptiennes ont lancé une grande campagne de répression contre la communauté LGBTQ +, procédant à des arrestations pour « indécence publique » et « incitation des jeunes à l’immoralité ». Mashrou' Leila avait dénoncé la « frénésie homophobe dans les médias » et trouvé « répugnant de penser que toute cette hystérie est due au fait que quelques gamins aient brandi un tissu représentant l’amour ».

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Parmi les spectateurs de ce concert au Caire, Sarah Hegazi, qui a brandi un drapeau arc-en-ciel. Une semaine plus tard, elle sera arrêtée par les services de sécurité égyptiens, accusée d’appartenir à une organisation « contraire à la loi » et « d’incitation à la débauche dans un lieu public ». Elle est maintenue en détention provisoire, puis arrêtée, condamnée et emprisonnée. Durant son séjour en prison, elle sera torturée. En 2018, elle s’exile au Canada. En juin 2020, elle se donnera la mort dans ce pays où elle se sentait seule, traumatisée par son expérience en prison. Pour Mashrou' Leila, cet événement sera une blessure supplémentaire, et le signe que se battre pour les droits LGBTQ + au Moyen Orient se paye au prix fort, celui du harcèlement et des menaces de mort.

Pour Hamad Sinno, il est temps de se réinventer

En 2019, les interdictions se reproduisent, mais cette fois dans leur propre pays, le Liban. Alors qu’un concert est prévu au festival de Byblos au début du mois d’août, le groupe est accusé de « blasphème » durant l’été, après le partage d’une photo parodiant l’image de la Vierge Marie sur Facebook. Sous la pression des autorités catholiques, leur concert est annulé. De nombreux fans viendront protester contre l’interdiction, réclamant plus de libertés individuelles et dénonçant le poids des organisations religieuses.

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Après des mois d’absence médiatique, Mashrou' Leila semblait avoir disparu. Jusqu’au 11 septembre dernier, où son chanteur et leader Hamad Sinno était invité du podcast libanais Sarde. Cet entretien d’1h30 en dévoile plus sur l’état mental du chanteur et ses projets, ses problèmes d’addiction et les menaces qu’il a pu recevoir dans les dernières années. Les années d’harcèlement homophobe, de luttes politiques, de menaces de mort et d’exil l’ont épuisé. Si Hamad Sinno a annoncé que le groupe ne prévoyait pas de retravailler ensemble pour l’instant, chacun des membres poursuit ses projets en parallèle. Sur les réseaux sociaux, de nombreux fans ont pleuré la séparation du groupe, et ont partagé leurs chansons préférées du groupe. Tout en rappelant qu’il y a eu un avant et un après Mashrou Leila pour la jeunesse du Moyen Orient.

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