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"On n'oblige personne à devenir comme nous": le témoignage d'un homme transgenre qui a accouché

Ali Aguado, militant transgenre ayant donné naissance à une fille en 2019, est revenu sur BFMTV sur la polémique autour d'une affiche du Planning familial montrant un homme transgenre "enceint".

Face à ce qu'il qualifie de "transphobie crasse", il revient sur sa grossesse. Ali Aguado, militant transgenre, a accepté de témoigner ce lundi soir sur BFMTV alors qu'une campagne du Planning familial consacrée aux hommes "enceints" fait l'objet de vives critiques sur les réseaux sociaux.

Celui qui est né femme, avant d'opérer une transition, a accouché de sa fille en 2019. Il raconte sur notre antenne avoir eu la chance de pouvoir rencontrer "des professionnels de santé aguerris à la question de la prise en charge des personnes trans".

"L'objectif du Planning, quoi qu'en disent ses détracteurs et notamment les militants du RN, c'est qu'il s'agit de répondre aux besoins des personnes en matière de santé", explique Ali Aguado, "il ne s'agit pas de théorie du genre: c'est juste du mieux dans la vie de tous les gens".

"Une personne enceinte reste une personne enceinte, que ce soit une personne trans ou une femme cisgenre", poursuit-il reprenant à son compte les propos d'une sage-femme qui l'avait accompagné lors de sa grossesse.

Le Planning familial a été la cible la semaine dernière de critiques après avoir lancé en mai dernier une campagne de communication dans laquelle figurait un homme transgenre "enceint". "Au planning, on sait que des hommes aussi peuvent être enceints", peut-on lire sur l'affiche de l'association, massivement partagée sur les réseaux sociaux et notamment Twitter.

"C'est de la transphobie crasse"

Ali Aguado affirme "comprendre" que l'affiche présentant deux hommes dont l'un transgenre et enceint puisse "surprendre": "Je ne vais pas prétendre que c'est banal, ça ne l'est pas. Ce que j'ai vécu, ce que vivent toutes le personnes trans qui deviennent parents [...] ce n'est pas une évidence dans le monde dans lequel on est. Pour autant on a des droits."

Le militant transgenre se dit malgré tout "assez surpris de l'ampleur" de la polémique suscitée par ces affiches: "Cela ne vient pas changer la vie des autres, simplement améliorer la nôtre."

Plusieurs personnalités politiques, notamment de l'extrême droite, ont dénoncé le message de cette campagne. La députée RN Laure Lavalette a fustigé des "militants archi-subventionnés qui ne cherchent qu'à répandre leur idéologie grotesque et mensongère" tandis que Laurence Trochu, proche d'Éric Zemmour, a dénoncé les "doctrines" de l'association?

"C'est de la transphobie crasse", leur répond Ali Aguado, déplorant "un débat scandaleux pour une poignée de personne" et rappelant la mission première du Planning familial: "Amener du soin à des personnes éloignées ou à des personnes qui n'ont pas accès à des soignants, à des professionnels de santé qui sont formés."

"En quoi cela vient retirer quelque chose aux femmes?"

"En aucun cas il ne s'agit de déranger des familles qui ne nous ressemblent pas mais on demande à ce qu'on nous laisse nous et nos enfants tranquilles. Nos familles vont bien et on a encore beaucoup de droits à acquérir en matière de santé et de filiation. On n'oblige personne à devenir comme nous", réaffirme-t-il sur BFMTV.

"En quoi cela vient retirer quelque chose aux femmes?", lance enfin le père de famille, soulignant la difficulté pour de nombreux hommes trans de disposer "d'espaces de santé qui nous prennent en charge médicalement parlant, notamment pour les enjeux gynécologiques".

Ali Aguado vient enfin apporter sa "solidarité" au dessinateur de l'affiche, victime de cyberharcèlement. Le Planning familial a quant à lui reçu ce lundi le soutien du gouvernement, par la voix d'Isabelle Rome.

La ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, a affirmé soutenir "pleinement" l'action du Planning familial. "Ne laissons pas l'extrême droite attiser les haines en instrumentalisant une campagne de communication dont je peux comprendre qu'elle ne fasse pas consensus", a déclaré la ministre auprès de nos confrères de l'AFP.

Hugues Garnier Journaliste BFMTV